L’extension de la forêt française (16,8 millions d’ha contre 14 millions d’ha aujourd’hui – 2/3 en feuillus et 1/3 en résineux) se fait au détriment des forêts naturelles et diversifiées (un écosystème vivant). En effet, de nombreux champs de résineux en rangs sont implantés dans de nombreuses régions (le pin Douglas dont la production a été multipliée par 6 en 30 ans au détriment des feuillus) et ces plantations en monoculture absorbent moins de CO2, sont pauvres en biodiversité, sont moins résistantes au feu et au changement climatique.
Des combattants du MORVAN (association Canopée ) se lèvent contre l’industrialisation de la forêt et ses effets désastreux :
Ils sont contre le remplacement du charbon par le bois et dénoncent l’omerta (la loi du silence) sur les carnages de l’exploitation forestière qui coupe des bois pour les transformer en sacs de granulés estampillés avec le label D.D (Développement Durable) qui trompe les consommateurs.
Ils sont contre les coupes rases (coupe à blanc) de tous les arbres dans nos anciennes forêts qui, avec les abatteuses, détruisent tout sans ménagement et laissent un sol nu complètement décapé (sujet à érosion), déstructuré, sans vie, un paysage désolant, en contribuant au réchauffement climatique (un champ de résineux absorbe 40% de Co2 en moins par rapport à une forêt naturelle. Nos vieilles forêts mosaïques sont notre meilleur bouclier contre le réchauffement climatique.
Ils sont contre l’utilisation du bois des coupes rases pour les chaudières à granulés de bois et pour produire de l’électricité dans les centrales à la place du charbon (Centrale à bois en cours de test à Gardanne qui importe des bois du Brésil). Des chênes centenaires sont transformés en granulés de bois.
Ils dénoncent les dégâts de la filière bois-énergie subventionnée par l’Etat français et l’Union Européenne : les champs de pins bien ordonnés, tous plantés en même temps, stockent 40 fois moins de carbone que les forêts diversifiées. Un champ d’arbres résineux est plus vulnérable au feu avec le vent qui s’engouffre entre les rangs alors qu’une forêt naturelle, compacte, au sous-bois humide, résiste mieux.
On marche sur la tête. A Drax en Angleterre, la plus grosse centrale bois engloutit 800.000 arbres /jour importés de 6 usines des US et de 11 usines du Canada. Plus la consommation de bois augmente, moins le stockage du carbone est important.
Ils sont pour une exploitation forestière maintenant en permanence une couverture arborée, pour la préservation des sols au maximum avec les fougères, l’humus et toute la faune et la flore qui prolifèrent.
Ils sont pour l’utilisation des tronçonneuses plutôt que les abatteuses d’arbres qui massacrent 3 à 4 ha /jour du lundi au samedi toute l’année.
Ils sont pour une loi qui protège et gère mieux la forêt en encadrant voire en interdisant les coupes rases. Ils regrettent qu’en mars 2020, la proposition de la convention citoyenne pour le climat n’ait pas été retenue dans le projet de loi climat débattu par les députés.
Des groupements forestiers rachètent des forêts naturelles pour les protéger.
Pourtant, il ne s’agit pas d’interdire les coupes de bois mais de couper des arbres en gestion durable et en respectant la nature.
En France, l’industrie du bois n’a pas les capacités pour transformer tout le bois de nos forêts. L’Etat délaisse les petites scieries en zones rurales (bois d’œuvre) et favorise les grosses unités (bois énergie). Des exploitants forestiers rêvent de vendre leurs bois en France mais sont contraints d’exporter (en Asie) en particulier les chênes (exportations multipliées par 10 en 10 ans) et les hêtres (peu de débouchés). Et les menuisiers rêvent d’acheter en France plutôt que d’importer de l’étranger (marché sans traçabilité). L’industrie forestière s’est spécialisée dans le pin qui est plus rentable que le chêne : il pousse en 40 ans, tronc droit, peu de nœuds.
Les arbres souffrent de la sécheresse. Le réchauffement climatique favorise la prolifération de certains insectes dont le scolyte qui se glisse sous l’écorce de l’arbre, empêche la sève de monter et dessèche en particulier les résineux. C’est une véritable catastrophe écologique visible en particulier dans les Vosges. Rien n’arrête le scolyte dans une forêt d’épicéas sauf les coupes sanitaires. Seuls résistent les feuillus.
Nos Aînés ont fait un mauvais choix d’essence. Après avoir prôné les résineux, l’Office National des Forêts (ONF) se pose des questions et fait un virage à 180 degrés. L’ONF réalise des plantations d’essais pour savoir quelles essences résisteraient mieux au changement climatique (Charmes, Sureau, Bourdaine, Noisetier, Genêt, Ronces).
Au lieu de modifier nos forêts pour l’industrie forestière, il est grand temps d’adapter l’industrie à la réalité de la forêt : les marronniers et les frênes qui disparaissent, les attaques du scolyte sont autant d’alertes de la nature qu’il convient de prendre en compte.
Il est plus que temps d’avoir une autre stratégie forestière pour le climat, l'environnement et la biodiversité.